Pas à pas - Un donjon au bord de l'eau

La réalisation de ce tableau est intéressante à décrire car elle va nous permettre de comprendre comment organiser son travail. Il a fallu trois séances espacées chacune de 24 heures pour que les couleurs commencent à sécher.

Le croquis : Que vous utilisiez du crayon ou du fusain pour réaliser votre croquis préparatoire de mise en place, nous ne saurions trop vous conseiller de fixer avec un produit en bombe votre dessin afin d'éviter que le noir ne se mélange avec les couleurs claires de la peinture à l'huile, sinon gare aux blancs et aux bleus grisâtres.

 

Ce tableau est peint en commençant par le ciel qui utilise les mêmes couleurs que celles du pas à pas "Une cabane à la montagne". Lors de cette première séance de travail, nous avons peint le ciel en totalité et la partie droite du tableau comportant le tronc d'arbre et les feuillages sur le sol.

Vous remarquerez que ce ciel est peint beaucoup plus en finesse que celui de la cabane à la montagne, même si les couleurs sont globalement les mêmes. Pour obtenir ce lissé, nous avons utilisé des brosses et des pinceaux en martre souple. Les couleurs doivent être bien mélangées à l'avance et rendues plus onctueuses par l'utilisation d'un medium à peindre approprié. Il en existe de toutes sortes dont les compositions varient d'une marque à l'autre. Vous pouvez aussi diluer légèrement les couleurs après mélange avec de l'essence de térébenthine si vous en supportez l'odeur. Il existe aussi dans le commerce des diluants sans odeur qui se rapprochent de l'essence de pétrole. Essayez divers produits jusqu'à ce que vous trouviez celui qui vous conviendra le mieux. Pour en revenir aux nuages, signalons que de petits rehauts de blanc "sorti du tube" ont été ajoutés sur le ciel terminé pour bien marquer les zones très éclairées. Ces rehauts ont été peints avec un pinceau fin de petite taille en effleurant la couche picturale précédente de la pointe du pinceau pour déposer un filet de blanc sans entraîner les nuages gris et créer des mélanges aléatoires.

Après 24 heures qui ont permis au ciel de commencer à sécher, nous avons entrepris de peindre les arbres et les feuillages qui viennent en superposition sur le ciel, ainsi que la tour.

Vous remarquerez sur cette photo comment les rehauts de couleur vert clair ont été posés délicatement avec une brosse utilisée à plat. Avec ce procédé, la couleur est déposée comme par frottement en créant des empâtements sur une peinture encore fraîche.

Astuce : Certains peintres créent ces rehauts en utilisant des éponges synthétiques qui leur servent à obtenir des textures aléatoires. Pour utiliser cette méthode, il faut attendre que la couche précédente soit parfaitement sèche, sinon vous risquez d'écraser la peinture et de créer des mélanges inesthétiques.

Point d'appui : Ce tableau nous donne aussi l'occasion d'évoquer l'utilisation d'un point d'appui (A) pour réaliser des détails, comme ici des branches sur le côté de la tour (B). Pour ce faire, vous utiliserez le manche d'un pinceau usagé ou une longue règle en bois (A) que vous poserez sur le haut de votre tableau et tiendrez fermement au-dessus de la couche picturale fraîche (sans la toucher bien sûr). Vous pourrez ainsi utiliser cet appui pour poser la paume de la main qui tiendra le pinceau chargé de peinture sans risquer d'endommager votre travail. De plus, vous obtiendrez plus de précision et de stabilité dans vos tracés.

La dernière séance de travail a été consacrée à la peinture de l'eau et à l'ajout de rehauts de lumière là où ceux-ci s'avéraient nécessaires.

Détails commentés

 

Remarquez comment l'utilisation d'une brosse à plat sur le tableau, un peu à la manière d'un couteau, permet de créer des empâtements sur la peinture fraîche. Vous noterez aussi que nous avons multiplié différentes sortes de verts, ajoutant même quelques touches d'ocre et de Sienne brûlée pour donner de la vie à cette surface.

Ce tronc d'arbre permet de mettre l'accent sur l'absence de couleur noire. Les teintes les plus foncées sont obtenues en mélangeant du bleu de Prusse et de la terre d'Ombre brûlée. Le bas du tronc est même constitué pratiquement uniquement de bleu, ce qui augmente les reliefs alors qu'une peinture noire aurait aplati la surface. Autre point qui mérite notre attention : le travail de l'écorce qui est obtenue en utilisant la plupart des verts qui constituent les feuillages alentours. En fait, tout au long du tableau, on utilise pratiquement les mêmes mélanges légèrement décalés vers les couleurs chaudes ou froides par ajout de jaune ou de bleu. Vous remarquerez aussi les rehauts de lumière sur le haut du buisson situé au pied du pont. N'hésitez pas à faire ressortir ainsi certaines zones. Pour éclaircir une couleur, commencez par obtenir un mélange aussi clair que possible, sans adjonction de blanc. Lorsque vous obtenez une couleur satisfaisante, ajoutez alors une petite pointe de blanc pour créer ces teintes caractéristiques des zones très lumineuses. On retrouve ce principe aussi dans les feuilles les plus claires de l'agrandissement ci-dessous. Vous pouvez même aller jusqu'à mélanger du jaune de cadmium et du blanc pour obtenir les teintes les plus lumineuses.

Si le tableau est jusqu'à maintenant peint avec une certaine liberté dans le mouvement de la main, nous avons donné plus de rigueur aux aplats de la tour qui sont peints avec des touches verticales pour en accentuer l'architecture. Le mur dans l'ombre est peint non pas en ajoutant du marron à votre mélange de base, mais bien du bleu qui accentue le relief au lieu de l'aplatir.

Les éléments constituant les murs et le pont sont peints à partir d'un mélange d'ocre jaune, de terre de Sienne brûlée, de terre d'Ombre brûlée, de bleu de Prusse et de bleu de ceruleum. Il est difficile de détailler exactement tous les mélanges, car ceux-ci sont faits dans la spontanéité, au cours du travail. Souvent, les élèves demandent : "Mais comment avez-vous obtenu cette couleur?"... Ce qui est important, ce n'est pas comment on obtient une couleur, mais plutôt la compréhension des associations possibles qui peuvent créer des teintes avoisinantes. Il n'y a que le restaurateur de tableaux qui a besoin de retrouver exactement la même couleur pour reconstituer une partie disparue. Débutants et même amateurs auront à coeur de tester toutes sortes de mélanges jusqu'à ce que naturellement ils obtiennent ce qu'ils espèrent. Nous irons même jusqu'à promouvoir la nécessité de faire différent de ce que vous avez sous les yeux, sinon vous resterez un copiste au lieu de devenir un créateur, ce qui est probablement votre ambition.

Ce dernier agrandissement consacré à la peinture de l'eau met l'accent sur la nécessité de créer une véritable texture avec l'utilisation de pinceaux et de brosses. Cette zone du tableau correspond à la dernière séance de travail. Nous avons commencé par réaliser un aplat bleu-vert foncé sur lequel nous avons ajouté une multitude de lumières et reflets constitués de toutes les couleurs avoisinantes sous la forme de petites touches. Vous remarquerez qu'il y a un petit peu du vert des arbres, des reflets du mur de la tour ou des nuages et des rehauts de couleur très claire (presque blancs) pour bien faire ressortir le flux de cette rivière en mouvement. Copyright © FM-CDD 2005

| Retour sommaire |